Le monument en hommage à Léon Duvauchel

C’est dans le numéro 12 du mois de décembre 1902 qu’est annoncé qu’un comité vient de se fonder et de prendre l’initiative de l’érection d’un monument “à notre très regretté ami et collaborateur Léon Duvauchel”.


L’initiative de l’érection d’un monument à Léon Duvauchel a été prise par M. Robert Warin, ainsi que par :

Duvauchel-Monument.jpgM. H. de Braisne, du Comité de la Société des Gens de Lettres ;

M. Jules Troubat, homme de lettres ;

M. J. Thorel, homme de lettres ;

M. H. Boutet, artiste peintre ;

M. G. Vautrey, de la Société les “Parisiens de Paris”.

M. Le Cholleux, directeur de la Revue septentrionale ;

M. J. Blu, conservateur du Musée Vivenel, à Compiègne ;

M. H. Quignon, vice-président des “Amis des Arts de l’Oise”, à Beauvais ;

M. P. Maison, directeur de la Picardie ;

M. E. Garet, du Comité des Rosati picards, à Amiens.


Les souscriptions devront être adressées à M. Robert Warin, secrétaire-trésorier, rue de Berri, 48, à Paris, ou à M. Blu, conservateur du Musée Vivenel, place de l’Hôtel de Ville, à Compiègne.


Ce comité adresse un chaleureux appel à tous les amis et à tous les admirateurs du poète-romancier du Tourbier, de L’Hortillonne, des Poèmes de Picardie, etc.


Tant de Compiègne que du département, de la région parisienne que de la province, les dons affluent. Les conseils municipaux de Saint-Jean, Compiègne et Paris votent chacun une subvention ainsi que le conseil général de l’Oise.


Les choses sont rondement menées. Le monument dû aux ciseaux du sculpteur picard A. Fossé est prêt à recevoir le médaillon de J.P. Legastelois pour l’inauguration qui a lieu le 21 juin 1903 à 16 heures.


Le journal littéraire “La Picardie” du mois de juillet 1903, nous relate cette manifestation.


La-Picardie.jpg“Le monument élevé à la mémoire de notre très regretté maître, ami et collaborateur Léon Duvauchel, dans le petit cimetière de Saint-Jean-aux-Bois, au cœur de la forêt de Compiègne, a été inauguré le 21 juin. Cette cérémonie, célébrée à la date anniversaire de la mort du poète-romancier, avait attiré dans le pittoresque village forestier une foule recueillie. Parmi les invités, amenés en voiture à La Moussière, on remarquait : MM. Henri de Braisne, Léo Claretié, Jules Troubat, hommes de lettres ; Noël, député ; Peiffer, inspecteur des forêt ; Blu, conservateur du musée Vivenel ; Delondre, adjoint de Compiègne ; les sculpteurs A. Fossé, auteur du monument, et Legastelois, auteur du médaillon ; Robert Warib, trésorier du comité ; Hector Quignon, des Amis des Arts de l’Oise ; Charles Halais, chancelier des Rosati de Paris ; Paul Maison, rédacteur en chef de La Picardie ; Botiaux-Daubrive ; Gustave Vautrey, délégué des Parisiens de Paris ; Robert Capelle, des Francs-Picards ; Plion, professeur au collège de Compiègne ; Chouquet, conseiller municipal de Compiègne ; Henry Lefebvre, directeur de la Dépêche de l’Oise et les représentants de la presse locale.


On se rend au pied du monument. Dans le cimetière se presse une foule nombreuse parmi laquelle on remarque une délégation des gardes-forestiers, qui ont tenu à venir rendre hommage au chantre de la forêt.


On fait tomber le voile, et le monument de Fossé, apparaît splendide, magnifiquement éclairé par un soleil radieux. Sur le tronc d’un hêtre, une jeune paysanne écrit les titres de quelques œuvres de Léon Duvauchel : La Clé des Champs, La Moussière, Le livre d’un forestier, L’Hortillonne, Poèmes de Picardie. Le feuillage abrite le médaillon de l’écrivain. L’ensemble du monument, à la fois simple et grandiose, est d’une très belle expression d’art et d’idée et fait le plus grand honneur au statuaire Fossé.


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Puis, commencent les discours. M. Henry de Braisne, président du comité, prend le premier la parole et prononce un remarquable discours retraçant sous une forme nouvelle et joliment littéraire, la vie et l’œuvre de Duvauchel.


M. Noël, député, prend la parole à son tour. Il dit comment il se lia avec Duvauchel et exalte ses idées républicaines. Puis c’est M. Peiffer, inspecteur des forêts, qui, gracieusement, poétiquement rend hommage au barde de la forêt qui, chaque année venait avec tant de joie « dans ce délicieux nid de La Moussière, entre cette superbe hêtraie qui lui sert de parure et cette vieille abbaye qui en est le joyau”.


Se succèdent ensuite sur l’estrade : M. Vautrey, qui parle au nom des Parisiens de Paris ; M. Robert Capelle, qui lit des vers déjà reproduit par plusieurs de nos confrères de l’Oise ; M. Charles Halais, qui, au nom des Rosati, dépose une gerbe de roses et prononce un discours ; M. Paul Maison, notre rédacteur en chef ; M. Hector Quignon, professeur au lycée de Beauvais, qui lit ne poésie de notre ami Maurice Garet et rappelle ensuite, en picard de la vallée de la Somme, que Léon Duvauchel admirateur de Puvis de Chavannes, reçoit aujourd’hui de l’art régional même hommage, en juste retour, avec un monument qui traduit si fortement son œuvre picarde.


Madame Botiaux-Daubrive, du Théâtre des Lettres, monte sur l’estrade. Elle ouvre les Poèmes de Picardie, le livre posthume de Duvauchel, douloureusement cravaté de crêpe, et lit avec un grand sentiment artistique trois de ses plus belles poésies et des vers de Charles Grandmougin.


C’est fini. S’inclinant respectueusement devant Madame et Mademoiselle Duvauchel, très émues et très touchées de l’imposante manifestation à laquelle elles viennent d’assister, M. Henry de Braisne leur fait remise du monument.


On regarde encore une fois ce monument, qui se détache harmonieusement dans une lumière douce, et la tombe, jonchée de fleurs, où dort l’écrivain grandement aimé, dont le beau talent et les qualités demeurent notre étendard et le nom notre programme.


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La foule, impressionnée, se disperse lentement. Les invités retournent à La Moussière et visitent le grand atelier de Duvauchel, tout plein de souvenirs du maître ; les murs sont garnis de ses toiles : pochades, études de forêt, paysages, que de pieuses mains ont exposés. On regarde, on fouille, on cause de l’Absent, on se souvient…


Enfin, il faut se séparer. On se quitte avec émotion et regret, à l’ombre du grand balcon, envahi par la verdure et les fleurs, d’où celui que nous pleurons dominait la paix de son ermitage…”

                                                                      Lucien de Chantereine

 

Source : gallica.bnf.fr/Bibliothèque nationale de France.


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